Barres et sillons appalachiens
En franchissant le contrefort de Dunham, une ligne reliant Bromont, Cowansville, Dunham et Frelighsburg, on pénètre sur le vaste territoire des barres et sillons appalachiens. Il s’agit du plus imposant des ensembles paysagers bromisquois occupant plus de 40 % de la superficie de la MRC.
Entre montagnes et plaines
Ce large palier, qui culmine à 300 mètres (à l’exception du mont Pinacle haut de 712 mètres), marque la transition entre le piedmont et les massifs appalachiens. Au cœur de ces panoramas, entremêlés de plateaux, de flancs et de vallées, on retrouve de multiples fermes où l’élevage et les pâturages sont encore à l’honneur.
Au nord, où le territoire s’échoue, un vaste bassin de sédimentation forme l’ensemble paysager du lac Brome. Ici, le relief a facilité le traçage des routes puis des chemins de fer. Ce qui a favorisé la naissance d’un des berceaux du tourisme bromisquois.
Un sol propice à l’agriculture
Les barres et de sillons appalachiens sont constitués d’une série de plateaux schisteux fortement érodés. Pendant des millions d’années, l’action de l’eau a créé de nombreuses buttes. Composées de quartzite et de dolomies, les barres ont mieux survécu à l’érosion que les sillons dont les sédiments étaient plus friables. Ces sillons ont justement été plus propices à l’établissement agricole.
Le sillon de Selby ainsi que les plateaux d’Alder ont été pâturés et mis en culture. Quant aux barres, elles ont davantage été boisées et investies par l’habitat secondaire. Les progrès agricoles au milieu du 20e siècle ont néanmoins permis de cultiver les pentes de schistes et d’ardoise; ce qui a donné naissance à de nombreux vergers, notamment à Frelighsburg. Les vignobles ont suivi au cours des trente dernières années.
Un paysage riche de petits hameaux
Les routes principales qui traversent le paysage des barres et sillons proposent de saisissants panoramas. Mais ce sont les routes et chemins de campagne, non numérotés, qui dévoilent de petits hameaux ayant autrefois fait les beaux jours de Brome-Missisquoi.
Au 19e siècle, de petits villages comme North Sutton, Draper Hill et West Sutton, tous situés sur le plateau d’Alder, vibraient au rythme de leurs richesses naturelles, telles la forêt, la potasse, l’ardoise. La découverte de cuivre, près du lieu-dit des Rochers-Bleus, a aussi entraîné une ruée. L’avènement du chemin de fer en 1871 a cependant provoqué la fin de ces agglomérations aldériennes, en déplaçant l’activité villageoise et industrielle vers le Sillon de Brome et la Vallée de la Sutton.
Dans le pays Sud-Bromien, l’activité agricole, présente depuis près de deux siècles, attire encore des milliers de visiteurs lors de la foire agricole annuelle présentée à Brome. Ce rendez-vous, tenu à la fin de l’été, s’affiche comme l’un des plus importants et plus anciens (1856) de la province.
Le Fort Pinacle
Le mont Pinacle demeure l’un des rares territoires montagneux de la région encore à l’état naturel. Du haut de ses 712 mètres, ce mont symbolise le combat entre développement et préservation. De 1985 à 1993, la montagne a fait l’objet d’une grande division entre les partisans d’un développement récréotouristique de grande envergure et des associations citoyennes visant la conservation de la nature. Le débat, qui s’est d’ailleurs rendu à la Cour Suprême, a créé un précédent juridique. Cette aventure frelighsbourgeoise a même inspiré une série télévisée : « Sous un ciel variable ».
Des paysages menacés par l’embourgeoisement
Si les flancs et plateaux des sillons et barres appalachiens sont recherchés par de nouveaux arrivants en quête de quiétude et de panoramas, les flancs des montagnes Vertes comptent plus du quart des superficies forestières de la MRC soumises à des processus de construction résidentielle, d’autres secteurs de villégiature, comme le lac Brome le sont aussi.
Pris d’assaut par les villégiateurs quelques années à peine après la fondation du village de Knowlton, le lac Brome compte aujourd’hui moins de 30 % de ses berges à l’état naturel. Ce qui soulève aujourd’hui deux enjeux majeurs. D’une part, la protection et la restauration des milieux humides nécessaires aux fonctions écologiques du lac Brome semblent inévitables. D’autre part, la question du bien commun et de l’accès aux berges demeure complexe au vu de la privatisation accélérée du paysage.